Avis n° 2020-1492 du 16 décembre 2020 sur la proposition tarifaire de La Poste relative à l'évolution des tarifs postaux des prestations offertes au titre du service public de transport et de distribution de la presse pour l'année 2021

Version initiale


  • AVERTISSEMENT

    Le présent document est un document public. Les données et informations protégées par la loi ont été supprimées et sont présentées de la manière suivante : [SDA…]


    L'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ci-après « l'Arcep » ou l'« Autorité »),
    Vu la directive 97/67/CE du 15 décembre 1997 modifiée, concernant les règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité de service ;
    Vu le code des postes et des communications électroniques (ci-après « CPCE »), et notamment ses articles L. 4, L. 5-2 et R. 1-1-17 ;
    Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom ;
    Vu le dossier décrivant les évolutions tarifaires des prestations offertes au titre du service public de transport et de distribution de la presse pour l'année 2021, transmis par la Direction générale des entreprises (ci-après « DGE ») par mail du 18 novembre 2020 ;
    Vu l'avis n° 2015-0831 de l'Arcep en date du 7 juillet 2015 relatif à la demande du Gouvernement sur les coûts de l'offre de transport et de distribution de la presse de La Poste ;
    Vu la décision n° 2017-1252 de l'Arcep en date du 26 octobre 2017 relative aux caractéristiques d'encadrement pluriannuel des tarifs des prestations du service universel postal sur la période 2019-2022 ;
    Vu l'avis n° 2018-1205 de l'Arcep en date du 1er octobre 2018 sur la proposition d'une nouvelle offre de La Poste pour le transport et la distribution de la presse de service public ;
    Vu l'avis n° 2018-1395 de l'Arcep en date du 15 novembre 2018 sur la proposition tarifaire de La Poste relative à l'évolution des tarifs postaux des prestations offertes au titre du service public de transport et de distribution de la presse pour l'année 2020 ;
    Vu l'avis n° 2019-1724 de l'Arcep en date du 28 novembre 2019 sur la proposition tarifaire de La Poste relative à l'évolution des tarifs postaux des prestations offertes au titre du service public de transport et de distribution de la presse pour l'année 2020 ;
    Vu l'avis n° 2019-1862 de l'Arcep en date du 17 décembre 2019 sur l'évaluation du coût net de la mission de transport et de distribution de la presse par La Poste ;
    Vu les autres pièces du dossier,
    Après en avoir délibéré le 16 décembre 2020,


    1. Contexte
    1.1. Cadre applicable


    En application du 5° de l'article L. 5-2 du CPCE, l'Autorité « émet un avis public sur les aspects économiques des tarifs visés au deuxième alinéa de l'article L. 4, préalablement à leur homologation par les ministres chargés des postes et de l'économie ». Les tarifs visés au deuxième alinéa de l'article L. 4 sont les tarifs des prestations offertes à la presse au titre du service public du transport et de la distribution de la presse, soumises au régime spécifique prévu par le CPCE. La structure tarifaire de ces prestations a pour objectif de favoriser le pluralisme, notamment celui de l'information politique et générale (ci-après « IPG »).
    L'article R. 1-1-17 du CPCE prévoit que : « La Poste soumet son projet de tarifs à l'approbation des ministres chargés des postes et de l'économie. Le ministre chargé des postes saisit l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes qui dispose d'un mois pour rendre son avis sur les aspects économiques du projet. Sauf décision contraire des ministres dans le délai de deux mois suivant la réception du projet, les tarifs sont réputés approuvés. »
    L'évolution des tarifs réglementés et le montant de la compensation de l'Etat étaient fixés jusqu'en 2015 par les accords « Schwartz » de 2008 (1). Sur la période 2016-2020, le niveau des évolutions tarifaires et le montant des compensations accordées par l'Etat à La Poste ont été fixés par une décision interministérielle en date du 5 septembre 2016. Celle-ci prévoyait une augmentation annuelle hors inflation de 0 % pour les quotidiens à faibles ressources publicitaires (ci-après « QFRP »), de 1 % pour la presse IPG et de 3 % pour la presse magazine agréée par la Commission Paritaire des Publications et Agences de Presse (ci-après « CPPAP »).


    1.2. L'évaluation du coût net de la mission de transport et de distribution de la presse par La Poste


    A la suite de l'approbation par la Commission européenne des compensations budgétaires accordées par l'Etat à La Poste au titre de sa mission presse, et en application du contrat d'entreprise Etat - La Poste (2018-2022), qui prévoit la réalisation d'une évaluation des coûts nets évitables de la mission presse, la secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie et des finances a demandé à l'Autorité de vérifier, à la fin de l'année 2019 et d'ici la fin de la période notifiée en 2022, l'absence de surcompensation de l'opérateur historique postal.
    Dans ce cadre, l'Autorité a évalué la méthodologie de calcul présenté par les autorités françaises lors de la notification à la Commission européenne. Elle a ainsi examiné les différents paramètres de ce modèle, en a estimé des variantes et a cherché à les améliorer afin d'aboutir à une évaluation la plus pertinente possible du coût net de la mission presse de La Poste.
    Cette analyse a fait l'objet de l'avis n° 2019-1862 du 17 décembre 2019 sur l'évaluation du coût net de la mission de transport et de distribution de la presse par La Poste. Au terme de son analyse et compte tenu des différents scénarios considérés, les travaux menés par l'Arcep ont permis de conclure avec une assurance raisonnable que La Poste n'est pas surcompensée pour la réalisation de sa mission presse.
    Conformément à la demande de la secrétaire d'Etat, cette analyse sera à renouveler d'ici 2022, en s'appuyant sur les pistes d'améliorations formulées dans l'avis n° 2019-1862.


    2. Le dossier tarifaire de La Poste pour l'année 2021


    Le 15 septembre 2020, La Poste a adressé une proposition tarifaire pour l'année 2021 dans la continuité des orientations gouvernementales antérieures (3 % pour les QFRP, 3 % pour les IPG, 3 % pour les autres titres CPPAP). Cette proposition n'a pas été homologuée, la DGE indiquant que : « La crise sanitaire et la situation très difficile traversée par l'ensemble de la filière presse ont conduit le Gouvernement à décider, pour l'année 2021, d'une augmentation ramenée à 1 % pour toutes les familles de presse, à laquelle s'ajoutera l'inflation de référence, calculée selon la méthode employée les années précédentes. Cette décision, concernant les tarifs 2021, ne préjuge pas des arbitrages qui seront pris dans le cadre de la réforme pour les années suivantes. »
    La DGE a invité La Poste à reformuler de nouvelles propositions sur la base d'un nouvel arbitrage gouvernemental correspondant à une augmentation de 1 % pour toutes les familles de presse, à laquelle s'ajoute l'inflation de référence, et précisé que ces nouvelles orientations pour l'année 2021 ne préjugeraient pas des arbitrages qui seront pris pour les années suivantes.
    En retour, La Poste a transmis le 13 novembre 2020 à la DGE de nouvelles propositions d'évolutions tarifaires pour l'année 2021 des prestations offertes au titre du service public de transport et de distribution de la presse et soumises au régime spécifique prévu par le CPCE.
    Conformément à l'article R. 1-1-17 du CPCE, le ministre chargé des postes a saisi le 17 novembre 2020 l'Arcep pour avis sur les aspects économiques du dossier tarifaire soumis par La Poste.
    Concernant la presse bénéficiant de l'agrément de la CPPAP, y compris la presse IPG et les QFRP, le dossier prévoit qu'une revalorisation de 1,0 % sera appliquée sur les tarifs de chacun des quatre niveaux d'urgence en sus du terme d'inflation égal à - 0,08 %, valeur de l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac entre juin 2019 (104,12) et juin 2020 (104,04). La hausse globale de + 0,92 % sera appliquée sur le tarif pivot de la « liasse directe code postal ».
    Les tarifs applicables selon le degré de préparation des envois, le caractère mécanisable ou non du produit de presse au regard des spécifications techniques émises par La Poste et les options disponibles s'en déduisent par l'application de coefficients.
    Le niveau de préparation « Liasse à trier PIC »
    Conformément à l'avis n° 2018-1205 du 1er octobre 2018, La Poste a mis en place une offre de distribution dite « Liasse à trier PIC (2) ». Elle est spécifique aux publications CPPAP et est réservée aux flux non-urgents (J+4) et économiques (J+7).
    Le recours au tri mécanique des exemplaires presse sur des machines réservées aux courriers grand format, présentes au sein des plateformes industrielles courrier (ci-après « PIC »), permet de réaliser des gains de productivité, alors que de nombreux envois presse font généralement l'objet d'un tri manuel avant d'être acheminés vers les établissements chargés de leur distribution.
    Afin de promouvoir son utilisation, le recours à cette offre a fait l'objet d'un repositionnement tarifaire en 2020. Le coefficient multiplicateur associé est ainsi passé de 1,208 à 1,185. A la suite de cette baisse de tarif, l'opérateur constate qu'« [à] fin octobre 2020, avec près de [SDA…] millions d'exemplaires, la part des flux faisant l'objet d'une préparation en “Liasse à trier PIC” représentait [SDA…] % du trafic de presse non-urgente (J+4) et de presse à tarif économique (J+7) », ce qui correspond, selon ces chiffres provisoires, à une progression par rapport à 2019 [SDA…] et 2018 [SDA…].


    3. Analyse de l'Autorité


    Les augmentations tarifaires hors inflation prévues par La Poste dans son dossier tarifaire sont conformes à celles fixées par le gouvernement. Elles correspondent à une hausse hors inflation de 1,0 % pour les titres admis au bénéfice du régime de la CPPAP, ainsi que pour la presse IPG et les QFRP. L'inflation de référence utilisée est calculée selon la même méthode que celle employée les années précédentes et correspond à l'évolution annuelle de l'indice des prix à la consommation hors tabac entre juin 2019 et juin 2020. Pour l'année 2021, l'inflation retenue est ainsi de - 0,08 %.
    Dans un contexte de baisse des volumes postaux, la décision de l'Arcep n° 2017-1252 du 26 octobre 2017 a fixé l'évolution moyenne annuelle (y compris inflation) des tarifs des prestations du service universel à 5 % sur la période 2019-2022. Au regard de cette décision, la hausse moyenne des tarifs des prestations de transport et de distribution de la presse en 2021, qui s'élève à 1,0 % hors inflation, parait modérée. Comme souhaité par le gouvernement, cette évolution est inférieure à celle observée pour les tarifs applicables en 2020 (+ 2,5 %), 2019 (+ 2,5 %) et 2018 (+ 2,4 %).
    Dans son dossier tarifaire, La Poste mentionne, pour l'année 2019, une attrition annuelle moyenne de - 8,2 % des flux bénéficiant de tarifs de presse aidée, qu'elle explique en partie « par la décision de certains éditeurs de transférer quelque [SDA…] millions d'exemplaires de presse magazine non urgente et économique vers une nouvelle offre postale créée en dehors du service public ».
    Le chiffre d'affaires a diminué proportionnellement aux volumes (- 8,7 %). En revanche, les coûts supportés par l'opérateur ont baissé à un rythme bien inférieur [SDA…], ce qui s'explique par l'importance des coûts fixes de distribution, mais aussi par la hausse des coûts de transport et par un effet de structure, lié à la mise en place d'une nouvelle offre commerciale. En effet, La Poste a mis en place en 2017 une offre dite « Grands Comptes » pour la presse froide (J+4 et J+7) dans les zones urbaines denses. Cette offre a conduit à un transfert de la demande des envois non-urgents en zones denses, de sorte que les envois coûteux prennent une part plus importante au sein du secteur public.
    Il en résulte qu'en 2019 le compte de la presse de service public présente un déficit brut à hauteur de 290 millions d'euros, ce qui, compte tenu de la compensation de 103,8 millions d'euros versée par l'Etat, en baisse de 8 millions d'euros par rapport à 2018, conduit à un déficit net de 186 millions d'euros. Ce dernier était de 176 millions d'euros en 2018 et augmente donc en 2019.


    4. Conclusion


    Dans un contexte de baisse des volumes postaux, en particulier de presse, les évolutions tarifaires proposées en 2021 sont modérées et inférieures à celles retenues pour les années 2019 et 2020. Elles sont, par ailleurs conformes à celles demandées par le gouvernement.
    Ces évolutions ne permettent pas aux tarifs de refléter les coûts sous-jacents ce qui accentuerait le déficit du compte de la presse aidée pour l'année 2021. Cette situation défavorable s'explique également par l'importance des coûts fixes de distribution mais aussi par par la hausse des coûts relatifs au transport et par l'augmentation de la part relative des envois urgents et en zone peu dense dans le secteur de la presse aidée.
    Au regard de l'offre dite « Grands Comptes », l'Autorité estime par ailleurs qu'une réflexion serait utile sur le périmètre à prendre en compte pour apprécier le coût net de service public. Le présent avis sera transmis au ministre chargé des postes. Il sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 16 décembre 2020.


Le président,
S. Soriano


(1) Protocole d'accord tripartite signé entre l'Etat, La Poste et la presse, le 23 juillet 2008.

(2) PIC : Plateformes Industrielles « Courrier ».
Extrait du Journal officiel électronique authentifié PDF - 224,3 Ko
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