Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure

Version en vigueur depuis le 30 août 2002

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Annexe I

Version en vigueur depuis le 30 août 2002

La sécurité est un droit fondamental et l'une des conditions de l'exercice des libertés individuelles et collectives.

L'Etat a le devoir d'assurer la sécurité en veillant sur l'ensemble du territoire de la République à la défense des institutions et des intérêts nationaux, au respect des lois, au maintien de la paix et de l'ordre public, à la protection des personnes et des biens.

Or, de 1981 à 2001, l'ensemble des faits constatés par la police nationale et la gendarmerie nationale ont augmenté de 40 % et, pour la première fois, la barre des quatre millions de crimes et de délits a été franchie en 2001.

Deux tendances se dégagent de cette période de vingt ans :

- l'une quantitative, l'augmentation exponentielle de la délinquance, que les chiffres illustrent de manière éloquente ;

- l'autre qualitative, l'importance prise par les violences contre les personnes, qui ne sont pas seulement liées à la classique délinquance d'appropriation mais qui prennent de plus en plus la forme de violences gratuites, voire de violences d'humiliation.

Cette situation qui frappe particulièrement les personnes les plus faibles porte atteinte aux principes fondamentaux de liberté, d'égalité et de fraternité et constitue une menace pour la cohésion nationale.

Ce constat de la réalité quotidienne doit conduire à la définition de priorités opérationnelles s'agissant notamment de :

- la montée de l'insécurité hors des grandes agglomérations. C'est l'indication nette que certains malfaiteurs n'hésitent pas à frapper loin de leurs bases en tirant profit de l'amélioration des réseaux de transport. C'est surtout le signe que de nouvelles catégories de la population ont basculé dans la délinquance et que des comportements délictuels qui se manifestaient presque exclusivement en milieu très urbanisé ont gagné les petites villes, voire les zones rurales. Ceci constitue une situation nouvelle à laquelle notre pays est confronté. Elle impose de revoir la répartition des zones de compétences entre les forces de sécurité intérieure et d'adapter l'organisation ainsi que les modes de fonctionnement des services ;

- la multiplication des zones où l'Etat n'exerce plus de façon suffisante la protection à laquelle nos concitoyens ont droit. L'éradication des zones de non-droit livrées à l'économie souterraine et à la loi des bandes constitue un devoir prioritaire ;

- la montée de la délinquance des mineurs, dont la part dans la délinquance de voie publique est passée de 28 % en 1995 à 36 % en 2001. Cette délinquance dont les auteurs sont de plus en plus jeunes et de plus en plus violents est encouragée par la relative impunité dont ils bénéficient. Il importe de donner aux services enquêteurs les moyens nécessaires pour mettre un terme à cette situation inacceptable ;

- le développement du trafic de drogues qui génère, en amont comme en aval, de multiples formes de délinquance et constitue un fléau sanitaire qui frappe en priorité les jeunes. Dans ce contexte, la nocivité de toutes les drogues doit être reconnue et la dépénalisation de l'usage de certains produits stupéfiants doit être rejetée.

Derrière les faits constatés de criminalité et de délinquance, il y a d'abord des victimes. Lorsqu'on indique que les faits constatés ont globalement progressé de 13,92 % entre 1998 et 2001, cela signifie qu'il y a eu 487 267 victimes supplémentaires, soit plus que la population de la ville de Lyon. La prise en compte par l'Etat de cette dimension humaine de la délinquance, à tous les stades de la procédure, est aussi un devoir. L'accueil, l'information et l'aide aux victimes sont donc pour les services de sécurité intérieure une priorité. Le rôle de l'État étant de restituer la justice et non de prodiguer la consolation, il convient de reconnaître à la victime un véritable statut lui garantissant une réponse systématique et homogène, une réponse rapide, adaptée et lisible non seulement de la part de la justice mais également des forces de sécurité qui, parce qu'elles sont souvent les premières averties, doivent s'acquitter de leur devoir de conseil en adressant les victimes à l'organisme approprié ou à la maison de justice et du droit la plus proche ; ils doivent en outre être en mesure de recueillir avec soin à tout moment les plaintes des victimes. Une "charte de qualité" en fixant les modalités sera établie pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale.

La loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 a, pour la première fois, posé les principes et les orientations permanents de la politique de sécurité.

Ces principes et ces orientations constituent des acquis, sur le fondement desquels une nouvelle étape doit être franchie.

En effet, la création, voulue par le Président de la République, d'un ministère en charge de la sécurité intérieure donne à l'Etat des moyens d'action nouveaux dont il importe de tirer les conséquences.

Pour exercer sa mission de sécurité intérieure, l'Etat dispose, à titre principal, d'une part de la police nationale et d'autre part de la gendarmerie nationale dont les personnels ont le statut militaire et qui conserve son rattachement organique au ministère de la défense.

Cette spécificité permet à la gendarmerie nationale de constituer, au sein des forces de sécurité intérieure, un élément de continuité de l'action de l'Etat avec le domaine de la défense.

Le ministre en charge de la sécurité intérieure bénéficie du concours d'autres services de l'Etat, notamment de la direction générale des douanes et droits indirects, de la direction générale des impôts et de la direction générale de la concurrence et de la consommation.

Les orientations qui sont présentées ci-après constituent le programme d'action en matière de sécurité intérieure que le Gouvernement se propose, avec le concours du Parlement, de mettre en oeuvre dans les cinq prochaines années.

Il s'articule autour de deux objectifs principaux :

- celui de fixer la nouvelle architecture institutionnelle de la sécurité intérieure et d'en tirer les conséquences sur les missions et l'organisation des forces de sécurité intérieure et le rôle des autres acteurs publics ou privés ;

- celui de donner aux services de sécurité intérieure un cadre juridique rénové leur permettant de lutter plus efficacement contre certaines formes de criminalité et de délinquance. Certaines des dispositions correspondant à cet objectif figurent dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice.

Un code de la sécurité intérieure regroupant l'ensemble des textes qui intéressent la sécurité publique et la sécurité civile sera préparé.


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