Circulaire du 30 septembre 2003 relative à la qualité de la réglementation

NOR : PRMX0306876C
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/circulaire/2003/9/30/PRMX0306876C/jo/texte
JORF n°228 du 2 octobre 2003
Texte n° 1

Version initiale


  • Paris, le 30 septembre 2003.


    Le Premier ministre à Mesdames et Messieurs
    les ministres et secrétaires d'Etat


    Par circulaire en date du 26 août 2003, le Premier ministre a défini un ensemble d'orientations en vue de maîtriser l'inflation normative et d'améliorer la qualité de la réglementation. Il demande aux ministères de se doter d'une charte de la qualité de la réglementation et de désigner des hauts fonctionnaires en charge de cette question. Il fixe également les lignes de force d'une réforme de la procédure de l'étude d'impact.
    La présente circulaire précise les conditions de mise en oeuvre de ces orientations.
    1. Adoption, par chaque ministère, d'une charte de la qualité de la réglementation.
    Ce document constituera le cadre donné par le ministre à ses services afin que ceux-ci prennent effectivement en compte dans leurs travaux le souci de qualité de la réglementation.
    1.1. A partir des recommandations figurant dans le rapport Mandelkern (http://www.ladocumentationfrancaise.fr/brp/notices/024000213.shtr), il conviendra donc d'y faire figurer un ensemble de prescriptions et de bonnes pratiques pour l'élaboration des textes, leur rédaction et leur publication.
    On y traitera notamment des points suivants :
    a) Instruments dont se dote le ministère pour acquérir une meilleure maîtrise de la réglementation qu'il produit et de son évolution (appréciation du volume des dispositions législatives et réglementaires en vigueur dans un secteur déterminé ; mesure du flux annuel des dispositions réglementaires au cours des dernières années ; indicateurs faisant apparaître, pour une période donnée, le rapport entre les dispositions abrogées et les dispositions nouvelles ; le cas échéant, objectifs de réduction en volume) ;
    b) Orientations données aux services pour la recherche de substituts à la réglementation (actions incitatives ; utilisation de dispositifs conventionnels...) ;
    c) Orientations données pour alléger le poids de la réglementation (respect du principe de proportionnalité ; suppression des formalités et des justificatifs qui ne sont pas indispensables) ;
    d) Mode d'association des administrés à l'élaboration de la réglementation qui les concerne directement (par exemple, cas dans lesquels il est recouru à la consultation d'un « échantillon » d'administrés ou à une consultation en ligne sur l'internet, usage des appels à commentaires...) ;
    e) Identification et prévention des problèmes que risque de poser l'application de la nouvelle réglementation, notamment par la mise à contribution des services en charge de l'application ou de son contrôle... ;
    f) Procédure utilisée pour s'assurer que la nouvelle réglementation est rédigée clairement et n'est pas d'un accès inutilement difficile ;
    g) Orientations données pour faciliter l'introduction des nouvelles règles (entrée en vigueur différée, dispositifs transitoires) ainsi que leur révision périodique (par exemple, en donnant au texte ou à certaines de ses dispositions une durée de validité limitée) ;
    h) Procédures utilisées pour évaluer a posteriori la qualité des nouvelles réglementations ainsi que l'effectivité de leur respect (enquêtes et sondages auprès des services déconcentrés, des administrés...) ;
    i) Programme de codification du ministère (échéancier arrêté avec la Commission supérieure de codification ; le cas échéant, travaux de codification à droit « non constant ») ; mise en place d'une organisation appropriée pour mener à bien les travaux de codification ;
    j) Association des services à compétence horizontale (directions juridiques, des finances, services d'évaluation et de prospective, services de communication) ainsi que des corps d'inspection relevant du ministère à la démarche de qualité et à la réalisation des études d'impact ;
    k) Actions d'information et de formation au profit des personnels chargés de l'élaboration de la réglementation.
    1.2. Il est clair que ces dispositions seront d'autant plus efficaces que l'on se gardera de tout systématisme au profit d'une approche concrète. Il paraît, par exemple, inutile de soumettre à consultation publique ou à évaluation l'ensemble des réglementations émanant du ministère. Il reste que la charte doit constituer un cadre clair et suffisamment prescriptif à l'usage des services qui élaborent la réglementation.
    Chaque ministère devra disposer d'une charte de la qualité avant le 1er mars 2004. Je ne verrais que des avantages à ce qu'elle soit rendue publique et figure, en particulier, sur le site internet de votre ministère.
    Je vous invite à me soumettre vos projets, ainsi que, le cas échéant, vos interrogations, avant la fin du mois de décembre. Il sera procédé à un bilan de l'état d'élaboration des chartes dans le courant du mois de janvier.
    A compter du mois de mars 2004, l'exposé des motifs des projets de loi et le rapport de présentation des projets de décret indiqueront les mesures prises, lors de la préparation du texte, en application de la charte de qualité. Ils feront en particulier apparaître la nature des consultations réalisées (consultation du public, des organismes professionnels du secteur, des collectivités territoriales, des services en charge de l'application ou du contrôle de la réglementation).
    Pour les projets de loi autorisant la ratification de traités ou l'approbation d'accords internationaux, une fiche d'impact juridique fera apparaître les conditions dans lesquelles le traité ou l'accord s'insère dans le droit national et, le cas échéant, communautaire, en précisant, s'il y a lieu, les modifications à apporter à ce droit et leur état de préparation.
    2. Désignation de hauts fonctionnaires responsables de la qualité de la réglementation.
    2.1. Ces hauts fonctionnaires se verront confier les missions suivantes :
    a) Ils veilleront à la mise en oeuvre effective de la charte de la qualité au sein du ministère et joueront, plus largement, un rôle d'impulsion, de sensibilisation et de coordination pour atteindre l'objectif de maîtrise de la réglementation ;
    b) Ils seront responsables, pour leur département ministériel, de la procédure de l'étude d'impact ; ils proposeront, en particulier, au ministre une méthode pour la réalisation de ces études et aideront à constituer, au sein du département, un vivier de personnes et services auxquels il pourra être fait appel ;
    c) Ils assureront, au sein du ministère, un rôle d'animation et de coordination pour rendre le droit plus facile d'accès ; ils seront notamment responsables de l'avancement des travaux de codification, ainsi que des procédures permettant de maintenir la qualité des codes adoptés, au gré de leurs modifications ; ils définiront également avec la Direction des Journaux officiels les procédures permettant de garantir la qualité de la consolidation des textes préparés par leur ministère qui sont diffusés sur l'internet :
    (www.legifrance.gouv.fr).
    d) Ils animeront l'action de simplification des textes en vigueur, seront les correspondants, pour votre ministère, de la délégation aux usagers et aux simplifications administratives et contribueront, en particulier, à la préparation et à la mise en oeuvre des lois habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par ordonnance.
    2.2. Il appartient à chaque ministre d'apprécier s'il est préférable, compte tenu de l'organisation de son département ainsi que des matières dont il a la charge, de désigner un haut fonctionnaire unique ou d'en choisir un pour chaque grand secteur de réglementation. Dans la seconde hypothèse, il conviendra évidemment que ces divers responsables travaillent de concert. Le ou les hauts fonctionnaires seront choisis parmi les directeurs, directeurs adjoints et chefs de service du ministère.
    Vous voudrez bien me faire connaître avant le 30 octobre les noms et qualités des hauts fonctionnaires que vous aurez désignés.
    3. Procédure de l'étude d'impact.
    Ainsi que le précise la circulaire du 26 août 2003 déjà mentionnée, l'étude d'impact ne sera désormais plus systématique. Pour les lois et les décrets, la décision d'y recourir sera prise au cas par cas, en fonction de la teneur du texte mis en chantier.
    Les textes qui feront l'objet d'une étude d'impact seront, en priorité, ceux qui sont susceptibles d'affecter de manière significative la situation des administrés (personnes physiques ou entreprises) et qui traduisent de véritables choix d'opportunité. A contrario, une étude d'impact sera généralement inutile lorsque les auteurs du texte ne disposent que d'une marge d'appréciation très limitée, notamment parce qu'ils prennent les dispositions requises pour l'application d'une loi ou la transposition d'une directive ayant déjà tranché les principales questions d'opportunité.
    Lorsque la réalisation d'une étude d'impact sera décidée, il conviendra en outre de déterminer ses points d'application privilégiés (impact juridique, impact social, économique et budgétaire, impact sur l'emploi, sur l'environnement, du point de vue du développement durable...) et d'en tirer les conséquences sur le choix des personnes et des services appelés à participer à l'étude.
    3.1. Pour les projets de loi et les projets de décret les plus importants, la décision de procéder ou non à une étude d'impact sera prise à l'issue d'une réunion interministérielle de programmation placée sous la présidence du cabinet du Premier ministre et du secrétaire général du Gouvernement, et à laquelle participera le ministère en charge de la réforme de l'Etat.
    Au vu des décisions prises, un échéancier prévisionnel des principales étapes de la préparation du projet de loi sera arrêté et communiqué au Conseil d'Etat.
    Les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale ne donneront pas lieu à étude d'impact, à moins qu'on n'y ait inséré des réformes substantielles. Il en ira de même des projets de loi d'habilitation.
    Pour les ordonnances, la décision d'engager une étude d'impact sera prise soit lors de la réunion de relecture du projet de loi d'habilitation si leur conception est déjà suffisamment avancée, soit lors d'une réunion qui se tiendra après l'adoption de la loi d'habilitation et permettra également de fixer le calendrier d'élaboration des ordonnances.


    3.2. En ce qui concerne les décrets, il conviendra de respecter les prescriptions suivantes :
    a) A l'occasion des réunions tenues chaque semestre pour l'organisation du travail du Gouvernement, vous dresserez un état de l'ensemble des projets de décret dont votre département envisage la mise en chantier dans les six mois à venir.
    Pour chaque projet, une fiche fera apparaître :
    - la teneur des principales dispositions ;
    - l'échéance de publication souhaitée ;
    - si la consultation du Conseil d'Etat est nécessaire, la date envisagée pour sa saisine.
    La fiche précisera également si le projet de texte présente un caractère d'urgence ou doit aboutir dans un délai déterminé. Dans l'affirmative, elle en indiquera les raisons.
    Ce recensement permettra d'identifier les projets de décret devant être soumis à étude d'impact.
    Par ailleurs, au vu de ses résultats, le secrétariat général du Gouvernement dressera un tableau prévisionnel pour l'élaboration des décrets en Conseil d'Etat durant les six mois à venir. Ce tableau, qui fera apparaître les priorités du Gouvernement, sera transmis au Conseil d'Etat.
    b) Les décrets d'application des lois nouvelles feront l'objet d'une procédure particulière.
    Une réunion interministérielle sera organisée dans les jours suivant la promulgation de la loi. Elle permettra d'effectuer le recensement des décrets nécessaires à l'application de la loi, d'apprécier quels sont ceux d'entre eux qui doivent faire l'objet d'une étude d'impact et d'arrêter un échéancier prévisionnel. Cet échéancier sera communiqué aux deux assemblées afin d'assurer l'information des parlementaires.
    3.3. Les réunions de programmation ainsi que les échanges qu'entretiendront les ministères avec le secrétariat général du Gouvernement permettront d'ajuster le contenu de l'étude d'impact et les conditions de sa réalisation à la teneur du dispositif envisagé. Le pragmatisme dont il sera fait preuve dans la mise au point de ces modalités sera la condition même du succès de la démarche.
    A cet égard, il sera tout à fait concevable de ne soumettre à étude d'impact qu'une partie de l'ensemble du dispositif d'un texte aussi bien que de décider la réalisation de plusieurs études.
    Par ailleurs, l'étude d'impact pourra elle-même conduire à retenir diverses autres mesures, tant en ce qui concerne la préparation du dispositif (consultation approfondie des professionnels du secteur ; échanges avec les services déconcentrés et les collectivités territoriales concernés...) que les conditions de son application (choix d'une expérimentation sur un périmètre réduit ; entrée en vigueur différée...) et de son évaluation.
    Selon la nature et l'importance du dispositif envisagé, la réalisation de l'étude sera entièrement prise en charge par le ministère rapporteur, au moyen de ses ressources internes, ou fera appel, dans une plus ou moins grande mesure, à des contributions extérieures (inspections générales, services d'autres ministères, notamment du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, du ministère de la justice, du ministère de l'écologie et du développement durable, du ministère en charge de la réforme de l'Etat).
    4. Un groupe de travail sera prochainement constitué, qui aura pour tâche, avec l'appui de la délégation aux usagers et aux simplifications administratives, de proposer des indicateurs permettant de mieux apprécier le coût de la réglementation. Les conclusions des travaux de ce groupe permettront un enrichissement progressif des chartes de la qualité de la réglementation.
    Le groupe fera en outre toute recommandation utile pour définir la méthode à suivre lors de la réalisation des études d'impact.


Pour le Premier ministre et par délégation :
Le secrétaire général du Gouvernement,
Jean-Marc Sauvé

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