Ordonnance n°67-820 du 23 septembre 1967 tendant à faciliter le redressement économique et financier de certaines entreprises

Dernière mise à jour des données de ce texte : 01 janvier 1986

Version abrogée depuis le 01 janvier 1986
  • Article Préambule (abrogé)

    Monsieur le Président,

    La loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la faillite personnelle et les banqueroutes, modifie profondément le droit de la faillite.

    En instaurant la distinction de l'homme et de l'entreprise, elle assure désormais toutes les chances raisonnables de survie aux entreprises compétitives victimes d'une défaillance accidentelle imputable à leurs dirigeants ou provoquée par des circonstances très exceptionnelles.

    En outre, par un ensemble de dispositions inspirées d'un souci de célérité et d'efficacité, elle rend la procédure judiciaire plus bénéfique que par le passé pour toutes les parties intéressées.

    Elle doit, dans ces conditions, amener, à l'avenir, devant les tribunaux saisis plus tôt, un plus grand nombre d'affaires en meilleur état et dont le redressement pourra, de ce fait, avec l'accord des créanciers, être tenté avec suffisamment de chances de succès.

    Au droit traditionnel de la faillite ainsi rénové, la présente ordonnance ajoute une procédure spéciale réservée à certaines entreprises dont la disparition serait de nature à causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale et pourrait être évitée dans des conditions jugées compatibles avec l'intérêt des créanciers (art. 1er).

    Le bénéfice de cette procédure est accordé moyennant une double exigence que n'impose pas la loi du 13 juillet 1967 :

    - la situation financière de l'entreprise, tout en étant difficile, ne doit pas être irrémédiablement compromise ;

    le tribunal doit donc avoir été saisi avant la cessation des paiements ;

    - le redressement de l'entreprise doit pouvoir être accompli dans un court délai, ne dépassant pas trois ans.

    Corrélativement, le soin d'appliquer la nouvelle procédure est réservé à des tribunaux importants, disposant d'un corps d'auxiliaires aux compétences diversifiées, siégeant dans des centres qui offrent les moyens indispensables d'information (art. 2). En outre, un rôle essentiel est dévolu au président du tribunal ; appelé à intervenir personnellement dès le déclenchement de la procédure (art. 5, 6 et 7), ce magistrat est chargé d'exercer un contrôle étroit sur son déroulement : à cet effet, il remplit lui-même, en principe, les fonctions de juge-commissaire (art. 12).

    Ainsi qu'il a été dit, la procédure de suspension provisoire des poursuites et d'apurement collectif du passif ne peut se situer que dans la période qui précède l'état de cessation des paiements dont elle tend à éviter la survenance. Dans le cas, par conséquent, où il y aurait été recouru tardivement, alors que la cessation des paiements serait un fait accompli, la procédure du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens devrait être immédiatement instaurée (art. 10, 21 et 31).

    Cette procédure exceptionnelle s'inspire de deux soucis complémentaires, celui d'inciter à une prévision aussi anticipée que possible de la menace de cessation des paiements et celui d'assurer une préparation et une exécution accélérées des mesures propres à écarter cette menace et à redresser une situation compromise. C'est donc à l'avance qu'il convient d'observer les signes avant-coureurs et d'exploiter les sources de renseignements, en même temps que d'étudier les réformes et rechercher les concours. Mais, dès que les difficultés ont pu être décelées et les remèdes envisagés, la procédure doit être mise en oeuvre. Et si, à cet effet, en dehors du pouvoir réservé au tribunal de se saisir d'office, l'initiative appartient normalement au débiteur, un droit d'action est accordé aux créanciers que l'importance de leurs créances met en mesure de porter sur la situation de l'entreprise une appréciation digne d'être prise en considération (art. 7 et 25).

    Une fois engagée, la procédure se développe à une cadence rapide.

    Aussitôt après une enquête préliminaire sommaire (art. 5, 7 et 8), elle se divise en deux phases. La première phase débute par un jugement qui ouvre une période pendant laquelle est suspendu l'exercice, par tous les créanciers sans exception, des poursuites individuelles contre le débiteur à qui simultanément sont interdits, sauf autorisation du juge-commissaire, tous actes de disposition étrangers à l'exploitation normale de l'entreprise et tous paiements de créances nées antérieurement au jugement ; la prescription des droits et actions des créanciers est suspendue (art. 10, 16, 17, 18 et 19).

    Le même jugement nomme un ou plusieurs curateurs aux biens du débiteur, chargés d'assister celui-ci ou même de le représenter (art. 12 et 13).

    La durée de la situation ainsi créée est, en principe, de trois mois (art. 11). Cette situation, en effet, si elle assure aux créanciers une égalité de traitement, est destinée à procurer au débiteur le temps de répit nécessaire pour arrêter et soumettre au tribunal un plan de redressement économique et financier assorti d'un plan d'apurement collectif du passif, qui doit permettre d'assurer le redressement de la situation et peut aller du simple octroi de délais à une réorganisation profonde de l'entreprise (art. 14 et 23).

    Le plan n'a pas le caractère d'un concordat, l'urgence requise ne permettant pas de constituer une masse créancière ni d'organiser les différentes formalités nécessaires pour la conclusion d'un concordat. Il est un acte unilatéral émanant du débiteur ou de son représentant judiciaire (art. 14) et dont les créanciers peuvent prendre connaissance (art. 23).

    Si le débiteur ne prend pas l'engagement d'exécuter le plan et s'il ne propose aucune autre solution jugée acceptable, il est mis fin à la suspension provisoire des poursuites. Le tribunal peut, dans ce cas, désigner un administrateur provisoire, qui est nommé et exerce ses fonctions dans les conditions du droit commun (art. 29).

    La première phase de la procédure prend fin avec le jugement qui statue sur le plan. Dans ce jugement, le tribunal apprécie le caractère sérieux du plan. S'il estime que ce caractère fait défaut, il rejette le plan. Au cas contraire, il l'admet (art. 28). Pour admettre le plan, le tribunal peut en modifier la teneur sur deux points importants : en imposant la condition qu'il soit procédé au remplacement du ou des dirigeants de l'entreprise (art. 32) ; en fixant les délais de paiement (art. 28). Le jugement d'admission du plan est opposable à tous les créanciers chirographaires ou privilégiés (art. 34). La prescription des droits et actions des créanciers demeure suspendue (art. 30).

    La seconde phase de la procédure s'ouvre alors : c'est celle de l'exécution du plan. Sa durée ne peut excéder trois ans (art. 27). Elle se poursuit sous la surveillance d'un commissaire à l'exécution du plan, chargé d'adresser un compte rendu périodique au président du tribunal (art. 28 et 36).

    Afin d'éviter l'abus de la procédure de suspension provisoire des poursuites et d'apurement collectif du passif, un nouveau cas d'ouverture du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens est créé : il est constitué par l'inexécution des obligations que le débiteur a souscrites dans le plan (art. 38). Pour sanctionner les irrégularités auxquelles la procédure pourrait donner lieu, des infractions pénales spéciales sont prévues (art. 46 et 48).

    Un choix important a dû être exercé sur le sort qu'il convenait de réserver aux voies de recours (tierce opposition, appel, pourvoi en cassation).

    En effet, le maintien des voies de recours conduit, en raison de la lenteur inhérente à leur exercice selon le droit commun, à ce que certaines d'entre elles, en particulier le pourvoi en cassation, risquent de n'aboutir qu'après que la décision aura été exécutée. En outre, si elles ne sont pas suspensives de l'exécution de cette décision, elles lui confèrent un caractère de précarité qui s'accorde mal avec la sécurité que requiert la procédure d'apurement collectif du passif. Enfin, elles entraînent un allongement des délais dont cette procédure saurait difficilement s'accommoder.

    Le système suivant a donc été conçu qui, s'il peut paraître audacieux, concilie au mieux des exigences contraires. Les voies de la tierce opposition et de l'appel ne sont maintenues que dans les cas où il apparaît que de légitimes intérêts doivent être protégés, c'est-à-dire essentiellement contre le jugement refusant une suspension des poursuites et contre le jugement statuant sur le plan d'apurement du passif (art. 40 et 41). Dans ces mêmes cas, le pourvoi en cassation reste ouvert.

    Les délais d'exercice de la tierce opposition et de l'appel sont uniformément ramenés à huit jours et leur point de départ est fixé, soit à la date du prononcé de la décision attaquée, soit à celle de sa publication.

    Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre haute approbation.

    Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.

  • Article 1 (abrogé)

    Il est institué une procédure de suspension provisoire des poursuites et d'apurement collectif du passif pour les entreprises en situation financière difficile mais non irrémédiablement compromise, dont la disparition serait de nature à causer un trouble grave à l'économie nationale ou régionale et pourrait être évitée dans des conditions compatibles avec l'intérêt des créanciers.

    Cette procédure est applicable aux commerçants ainsi qu'aux personnes morales de droit privé, même non commerçantes.

      • Article 10 (abrogé)

        Le tribunal statue en chambre du conseil, le débiteur entendu ou dûment appelé.

        S'il estime que la situation justifie l'ouverture de la procédure, il prononce la suspension provisoire des poursuites.

        S'il constate la cessation des paiements du débiteur, il prononce d'office le règlement judiciaire ou la liquidation des biens et renvoie, s'il y a lieu, la procédure au tribunal normalement compétent qui se trouve ainsi saisi. Il peut ordonner toute mesure urgente et notamment désigner provisoirement un syndic. Il demeure compétent pour statuer sur la tierce opposition formée contre ces décisions.

        Le tribunal normalement compétent connaît dès sa saisine de toutes les questions nées du déroulement de la procédure.

    • Article 40 (abrogé)

      Les jugements prononçant la suspension provisoire des poursuites ne sont susceptibles d'aucune voie de recours.

      Les jugements refusant la suspension provisoire des poursuites ou y mettant fin ne peuvent être attaqués que par la voie de l'appel ; l'appel est interjeté dans le délai de huit jours à compter du prononcé du jugement.

      La cour doit statuer dans les deux mois.

      Si la cour prononce la suspension provisoire, elle fixe la durée du délai prévu à l'article 11 et renvoie la cause et les parties devant le tribunal.

      Si la cour ne prononce pas la suspension provisoire des poursuites et constate l'état de cessation des paiements du débiteur, elle prononce le règlement judiciaire ou la liquidation des biens et renvoie la procédure devant le tribunal normalement compétent ; elle procède comme il est dit à l'article 10, alinéa 3.

      La décision de la cour d'appel prononçant la suspension provisoire des poursuites ne peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

    • Article 44 (abrogé)

      Modifié par Loi 85-9> 1985-01-25 art. 238 JORF 26 janvier 1985 en vigueur le 1er janvier 1986

      Ne sont susceptibles d'aucune voie de recours les décisions prises en vertu des articles 12 et 13.

      Toutefois, l'appel des jugements relatifs à la nomination, au remplacement et à l'étendue des pouvoirs d'un ou plusieurs curateurs est ouvert au procureur de la République, même lorsque celui-ci n'a pas agi comme partie principale.

    • Article 45 (abrogé)

      Les décisions du juge-commissaire visées aux articles 17 et 18 ne peuvent faire l'objet que d'une opposition devant le tribunal dans le délai de huit jours à compter du jour où elles sont intervenues.

      Le tribunal doit statuer dans le délai de huit jours à compter du jour où l'opposition est formée.

      Les décisions du tribunal ne sont susceptibles d'aucune voie de recours.

    • Article 46 (abrogé)

      Est passible d'un emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 10.000 F à 300.000 F tout commerçant ou tout dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale qui, à l'occasion d'une procédure de suspension provisoire des poursuites, a, de mauvaise foi, présenté ou fait présenter un compte d'exploitation générale ou un compte de pertes et profits ou un bilan ou un état des créances et des dettes ou un état actif et passif des privilèges et sûretés, inexact ou incomplet.

    • Article 47 (abrogé)

      Est passible d'un emprisonnement d'un mois à deux ans et d'une amende de 10.000 à 200.000 F :

      1° Tout commerçant ou tout dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale qui, pendant la période de suspension provisoire des poursuites, a, sans autorisation du juge-commissaire, consenti une hypothèque ou un nantissement, ou a fait un acte de disposition étranger à l'exploitation normale de l'entreprise ou payé, en tout ou partie, une dette née antérieurement à la décision prononçant ladite suspension ;

      2° Tout commerçant ou tout dirigeant de droit ou de fait d'une personne morale qui a effectué un paiement en violation du plan d'apurement collectif du passif ou qui, dans les mêmes conditions, a fait un acte de disposition étranger à l'exploitation normale de l'entreprise ou un paiement irrégulier ;

      3° Toute personne qui, pendant la période de suspension provisoire des poursuites ou celle d'exécution du plan d'apurement collectif du passif et en connaissance de la situation du débiteur, a passé avec celui-ci l'un des contrats prévus au 2° ci-dessus ou en a reçu un paiement irrégulier.

    • Article 48 (abrogé)

      Tout curateur qui se rend coupable de malversation dans sa gestion est passible des peines prévues à l'article 408, alinéa 2, du code pénal.

      Est passible des mêmes peines tout curateur ou tout commissaire à l'exécution du plan d'apurement collectif du passif qui, de connivence avec le débiteur omet de signaler les violations commises par celui-ci des interdictions et obligations résultant du jugement ordonnant la suspension provisoire des poursuites ou du jugement homologuant le plan d'apurement collectif du passif.

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