Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 25 avril 2013, 12-13.234, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er décembre 2011), que M. X..., entraîneur de chevaux de course, contestant être redevable de cotisations auprès de la caisse de mutualité sociale agricole d'Ile-de-France (la caisse), a frappé d'opposition devant une juridiction de sécurité sociale une contrainte décernée par la caisse pour avoir paiement des cotisations et majorations de retard pour les années 1996 et 1997 ;

Sur la demande de saisine préjudicielle de la Cour de justice de l'Union européenne, qui est préalable :

Attendu que M. X... demande que soit posée à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante :

En application des directives européennes 92/49/CEE et 92/96/CEE, entièrement transposées dans le droit national par les lois n° 94-5 du 4 janvier 1994, n° 94-678 du 8 août 1994 et par l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001 ratifiée par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001, un citoyen français exerçant une profession agricole peut-il librement opter pour le régime général de protection sociale ? Les dispositions du droit national qui y feraient obstacle sont-elles compatibles avec le droit européen ?

Mais attendu que si l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne rend obligatoire le renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l'Union européenne lorsque la question est soulevée devant une juridiction dont la décision n'est pas susceptible d'un recours juridictionnel en droit interne, cette obligation disparaît quand la question soulevée est matériellement identique à une question ayant déjà fait l'objet d'une décision à titre préjudiciel dans une espèce analogue ;

Et attendu que la Cour de justice des communautés européennes saisie d'une question identique l'a tranchée par arrêt du 26 mars 1996 (affaire C.238/94) ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu à saisine préjudicielle ;

Et sur le moyen unique :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, que transposée par la loi n° 94-678 du 8 août 1994, l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001, ainsi que par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001, les Directives européennes n° 92/49/CEE et n° 92/96/CEE du 18 juin 1992 et du 10 novembre 1992, adoptées sur le fondement des articles 85 et 86 du Traité CE (devenus les articles 101 et 102 TFUE), s'appliquent aux assurances non vie comprises dans un régime légal de sécurité sociale pratiquées par des entreprises ; que sont des entreprises les caisses de sécurité sociale, organismes de droit privé chargés d'une mission de service public qui, dans la gestion du système de protection sociale des professions agricoles, exercent une activité propre et constituent des unités économiques de services, excluant ainsi tout monopole ; qu'en jugeant le contraire pour refuser à M. X... le droit de choisir librement le régime général de protection sociale aux lieu et place de celui applicable aux professions agricoles et pour le débouter de son opposition à contrainte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Mais attendu que les dispositions des directives du Conseil des communautés européennes des 18 juin 1992 et 10 novembre 1992 concernant l'assurance ne sont pas applicables aux régimes légaux de sécurité sociale fondés sur le principe de solidarité nationale dans le cadre d'une affiliation obligatoire des intéressés et de leurs ayants droit énoncée à l'article L. 111-1 du code de la sécurité sociale, ces régimes n'exerçant pas une activité économique ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à la caisse de mutualité sociale agricole de Paris Ile-de-France la somme de 2 500 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de son opposition à contrainte et d'AVOIR, en conséquence, validé la contrainte signifiée par la Caisse de mutualité sociale agricole pour un montant total de 30.778,76 euros ;

AUX MOTIFS QUE la question relative à la conformité de l'affiliation d'office au régime de protection sociale agricole au regard des dispositions européennes garantissant la libre prestation de services ne présente pas de caractère sérieux justifiant un renvoi pour interprétation devant la Cour de justice ; qu'en effet, les directives 92/49/CEE et 92/96 du Conseil des 18 juin et 10 novembre 1992 invoquées par l'appelant ne sont pas applicables aux organismes chargés de la gestion des régimes obligatoires de base sécurité sociale ; que cette exclusion du champ d'application des directives européennes résulte expressément de l'article 2 des directives ; que la demande de renvoi sera rejetée ; que sur le libre choix du régime de protection sociale ; que monsieur X... maintient qu'il pouvait librement choisir le régime de protection sociale ; que cependant que la transposition en droit français des directives européennes précitées, dont on a vu qu'elles ne concernaient pas les assurances sociales obligatoires de base, n'a pas eu pour effet d'ouvrir à la libre concurrence le régime français obligatoire de sécurité sociale applicable aux profession agricoles ; que monsieur X... ne peut pas non plus se plaindre d'une discrimination à son détriment au motif que la transposition des directives litigieuses a bien été effectuée dans le livre IX du code de la sécurité sociale relatif à la protection sociale complémentaire mais pas dans les livre VI et VII relatifs aux divers régimes légaux de sécurité sociale ; qu'il s'agit de deux systèmes distincts autorisant un traitement différent (arrêt, p. 5, onzième à quinzième alinéas, p. 6, premier et deuxième alinéas) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le tribunal a été saisi d'un litige sur l'assujettissement des entraineurs de chevaux de courses au régime agricole ; que le tribunal a estimé que les entraineurs de chevaux de courses relevaient bien du régime agricole et ce, en application de l'article 1144-1° du code rural ; que la contrainte a été régulièrement précédée d'une mise en demeure recommandée en date du 6 février 1998 ; qu'en ce qui concerne le calcul des cotisations contesté par l'intéressé, il est établi que monsieur X... Jean-Claude n'a pas saisi, après l'envoi de la mise en demeure, la commission de recours amiable sur ce point ; qu'il se contente aujourd'hui sans apporter aucun élément susceptible de contredire le calcul effectué par la caisse ; qu'il convient en conséquence de débouter monsieur X... Jean-Claude de son opposition et de valider la contrainte litigieuse (jugement, p. 2, sixième à huitième alinéas, p. 3, premier à troisième alinéas) ;

ALORS QUE transposée par la loi n° 94-678 du 8 août 1994, l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001, ainsi que par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001, les directives européennes n° 92/49/CEE et n° 92/96/CEE du 18 juin 1992 et du 10 novembre 1992, adoptées sur le fondement des articles 85 et 86 du Traité CE (devenus les articles 101 et 102 TFUE), s'appliquent aux assurances non vie comprises dans un régime légal de sécurité sociale pratiquées par des entreprises ; que sont des entreprises les caisses de sécurité sociale, organismes de droit privé chargés d'une mission de service public qui, dans la gestion du système de protection sociale des professions agricoles, exercent une activité propre et constituent des unités économiques de services, excluant ainsi tout monopole ; qu'en jugeant le contraire pour refuser à monsieur X... le droit de choisir librement le régime général de protection sociale aux lieu et place de celui applicable aux professions agricoles et pour le débouter de son opposition à contrainte, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

ECLI:FR:CCASS:2013:C200685
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