Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 janvier 2011, 10-17.653, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 2324-4-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'article L. 2324-4-1 du code du travail, que la validité du protocole d'accord préélectoral conclu entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées est subordonnée à sa signature par la majorité des organisations syndicales ayant participé à sa négociation, dont les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ou, lorsque ces résultats ne sont pas disponibles, la majorité des organisations représentatives dans l'entreprise ; que le nombre de voix recueillies par les organisations syndicales à prendre en considération pour le décompte des suffrages exprimés en leur faveur est le nombre de suffrages exprimés au profit de chaque liste, sans qu'il y ait lieu, s'agissant de la mesure de représentativité des organisations syndicales, de tenir compte d'éventuelles ratures de noms de candidats ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que dans le cadre de l'organisation des élections des représentants du personnel de la société Dernières Nouvelles d'Alsace (DNA), un protocole préélectoral a été signé le 25 mars 2010 entre l'employeur et six des sept organisations syndicales invitées à la négociation ; que le syndicat Filpac CGT, non signataire, a saisi le tribunal d'instance pour qu'il soit constaté que le protocole n'était pas valide en ce que lui-même ayant obtenu 82,91 % des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles, la condition de double majorité n'était pas remplie ;

Attendu que pour écarter la contestation du syndicat Filpac CGT, le tribunal après avoir énoncé que s'agissant d'un scrutin de liste, le nombre de voix obtenu par une liste est égal au total des voix obtenues par chaque candidat divisé par le nombre de candidats figurant sur la liste, relève que la liste de la CGT aux élections précédentes comportait six candidats et avait totalisé 1 606 voix soit, compte tenu des modalités de calcul rappelées ci-dessus, 267,66 voix, de sorte que la majorité de 286 voix n'était pas atteinte ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de prendre en compte pour une unité le nombre de voix obtenu par chacune des listes présentées aux dernières élections pour vérifier si les conditions de majorité nécessaires à la validité du protocole préélectoral étaient ou non remplies, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 mai 2010, entre les parties, par le tribunal d'instance de Strasbourg ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance d'Haguenau ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour le syndicat Filpac CGT.

Le syndicat Filpac CGT fait grief au jugement attaqué d'avoir déclaré irrecevable sa demande d'annulation du protocole préélectoral du 25 mars 2010 ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 2324-4-1 du code du travail pose une condition de double majorité pour que la signature d'un protocole d'accord préélectoral soir reconnue valable ; que s'agissant de la deuxième condition de majorité, litigieuse en l'espèce, il sera rappelé que les élections des représentants du personnel se font au scrutin de liste, et à deux tours avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, ainsi qu'il est rappelé aux articles L. 2314-24 et L. 2324-22 du code du travail ; que s'agissant d'un scrutin de liste, le nombre de voix obtenu par une liste est égal au total des voix obtenues par chaque candidat divisé par le nombre de candidats figurant sur la liste, et non, comme soutenu par le demandeur, au nombre total des voix obtenu par chacun des candidats, ce mode de calcul permettant de ne pas pénaliser les syndicats qui présentent une liste incomplète ou réduite à un seul nom et étant également souligné que toutes les règles relatives à l'attribution des sièges sont d'ordre public absolu ; qu'il résulte par conséquent des données chiffrées fournies par les parties et notamment par la société DNA, que le nombre de suffrages valablement exprimés lors des élections du 27 mars 2008 était de 571, soit 584 votants sur 828 inscrits déduction faite de 13 bulletins blancs et nuls, que la majorité absolue était par conséquent de 286 voix ; que la liste FILPAC CGT comportait 6 candidats et a totalisé 1.606 voix, soit, compte tenu des modalités de calcul rappelées ci-dessus, 267,66 voix, de sorte que la majorité de 286 voix n'est pas atteinte ; que par contre, les voix totalisées par les autres syndicats, dont les listes ne comportaient qu'un candidat à l'exception de la liste SNJ CGT qui en comportait deux, s'élèvent à 291, soit un nombre supérieur à la majorité absolue ; qu'il apparaît dès lors que la seconde condition de majorité prévue par l'article L. 2324-4-1 du code du travail est remplie, le protocole ayant été signé par les organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles ; que par ailleurs, et en application de l'article L. 2232-12 du code du travail, le syndicat demandeur doit être déclaré irrecevable en sa contestation de la validité du protocole préélectoral du 25 mars 2010 dès lors qu'il n'a pas recueilli la majorité des voix aux dernières élections ;

ALORS QUE un syndicat est recevable à contester la validité du protocole d'accord préélectoral quel qu'aient été ses résultats aux élections précédentes; que dès lors, le tribunal d'instance qui, pour déclarer irrecevable le syndicat Filpac CGT en sa contestation de la validité du protocole préélectoral conclut le 25 mars 2010 dans le cadre des élections professionnelles devant se dérouler au sein de la société Dernières nouvelles d'Alsace, s'est fondé sur la circonstance inopérante que ce dernier n'avait pas recueilli la majorité des voix aux dernières élections, a violé les articles L. 2324-4-1, L. 2324-23 et L. 2232-12 du code du travail ;

ALORS QUE pour déterminer si les organisations syndicales représentatives ayant signé le protocole d'accord préélectoral avaient obtenu la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles, ce qui conditionne la validité de ce document, il y a lieu de prendre en compte le nombre total des voix obtenues par leurs candidats ; que dès lors, le tribunal d'instance qui, pour décider que les organisations syndicales ayant signé le protocole d'accord préélectoral du 25 mars 2010 avaient obtenu aux élections précédentes la majorité des suffrages exprimés, a énoncé que s'agissant d'un scrutin de liste, le nombre de voix obtenues par une liste est égal au total des voix obtenues par les candidats de cette liste divisé par le nombre de candidat figurant sur celle-ci, a violé l'article L. 2324-4-1 du code du travail.

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