Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 4 février 2009, 08-11.433, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 octobre 2007), que par acte du 15 avril 2003, M. X..., titulaire d'un bail portant sur des locaux à usage exclusif d'enseignement appartenant à la société immobilière Provençale (SIP), en a sollicité le renouvellement ; que la bailleresse lui ayant opposé un refus de renouvellement sans indemnité d'éviction au motif qu'il n'était pas propriétaire du fonds qui abritait une association exerçant son activité sans avoir reçu l'agrément de l'administration, M. X... l'a assignée pour se voir reconnaître le bénéfice du statut des baux commerciaux et obtenir le paiement d'une indemnité d'éviction ainsi que des dommages-intérêts ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au juge saisi d'un litige opposant les parties à un bail commercial quant à l'application au preneur du statut des baux commerciaux de rechercher si le preneur bénéficiant d'une autorisation d'exercer, délivrée sous l'empire d'une législation ensuite abrogée, est tenu de déposer une nouvelle déclaration ; qu'en énonçant, que l'établissement d'activité physique et sportive exploité par M. X... n'avait fait l'objet d'aucune déclaration dans les conditions prévues par les articles 47 et 47-1 de la loi du 16 juillet 1984, de sorte qu'il ne pouvait bénéficier du statut des baux commerciaux, sans rechercher, comme elle y était invitée si M. X..., qui exploitait ce même établissement depuis 1966 et avait d'ores et déjà déclaré cette exploitation le 22 janvier 1970 dans les conditions prévues par l'article 4 du décret n° 69-1000 du 3 novembre 1969 pris en application de la loi n° 63-807 du 6 août 1963, était tenu de procéder à une nouvelle déclaration dans les conditions prévues par le décret n° 93-1101 du 3 septembre 1993, pris en application de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 145-2 et L. 145-17 du code de commerce, L. 463-4 du code de l'éducation et 2 du décret n° 93-1101 du 3 septembre 1993 ;

2°/ qu'il résulte de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme que, si une personne peut être privée d'un droit de créance, c'est à la condition que soit respecté le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect de ses biens ; que ne répondent pas à ces exigences, la loi du 16 juillet 1984 et le décret du 3 septembre 1993 en ce qu'ils imposent au titulaire d'une autorisation d'exercice professionnel qui a pris à bail un local commercial et bénéficie ainsi du statut des baux commerciaux de renouveler sa déclaration à la préfecture ; qu'en énonçant que M. X... se trouvait privé du bénéfice du statut parce qu'il exerçait irrégulièrement son activité en l'absence de déclaration effectuée dans les conditions prévues par les articles 47 et 47-1 de la loi du 16 juillet 1984 et 2 du décret du 3 septembre 1993, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1er du premier protocole additionnel à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 145-2 et L. 145-17 du code de commerce, L. 463-4 du code de l'éducation et 2 du décret n° 93-1101 du 3 septembre 1993 ;

Mais attendu que le fait pour le bailleur d'un local ou immeuble abritant un établissement d'enseignement d'invoquer, pour dénier au locataire le bénéfice du droit au renouvellement de son bail, les conditions prévues par l'article 47 de la loi du 16 juillet 1984, devenu l'article L. 463-4 du code de l'éducation, et l'article 2 du décret n° 93-1109 du 3 septembre 1993 imposant au titulaire d'une autorisation délivrée sous l'empire d'une ancienne législation d'effectuer dans un certain délai une nouvelle déclaration à la préfecture, ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit à la "propriété commerciale" reconnu aux locataires au regard des dispositions de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que ces dispositions combinées avec celles du code de commerce relatives au renouvellement du bail commercial réalisent un équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs des droits fondamentaux de la personne ; qu'ayant relevé qu'il résultait d'une attestation délivrée le 6 octobre 2003 par un agent assermenté à la direction départementale de la jeunesse et des sports que M. X... n'avait, à cette date, déposé aucune déclaration d'établissement d'activité physique et sportive conforme à la législation en vigueur, la cour d'appel, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que M. X..., qui se trouvait dans l'illégalité, ne pouvait bénéficier du droit au renouvellement de son bail ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi :

condamne M. X... aux dépens :

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., le condamne à payer à la SIP la somme de 2500 euros :

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille neuf.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant dit que Monsieur X... ne peut se prévaloir du droit au renouvellement du bail commercial l'unissant à la Société Immobilière Provençale par acte sous seing privé du 7 septembre 1994 pour les locaux situés à Hyères et de l'avoir en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes et notamment de sa demande de paiement d'une indemnité d'éviction

AUX MOTIFS QUE le statut des baux commerciaux ne bénéficie aux établissements d'enseignement que pour autant que ceux-ci exercent régulièrement leur activité, l'article L.145-2 du Code de commerce ne pouvant attribuer des effets juridiques quelconques à une pratique professionnelle qui ne respecterait pas les lois et règlements en vigueur ; Or, à l'appui de son appel, la Société Immobilière Provençale fait valoir, parmi d'autre moyens moins pertinents : 1° - Que Monsieur X..., titulaire d'un Certificat d'Aide Moniteur d'Education Physique Militaire, et d'une autorisation, délivrée par le Recteur de l'Académie de Nice, le 29 novembre 1968, lui permettant d'enseigner l'éducation physique à titre rémunéré, sous certaines conditions qui ne seraient pas remplies en l'espèce, ne pouvait exploiter une salle de culture physique ; 2° - Que son établissement n'a fait l'objet d'aucune déclaration d'Etablissement d'Activité Physique et Sportive prévue par les articles 47 et 47-1 de la loi n°84-610 du 16 juillet 1984 ; Que Monsieur X... a soulevé l'irrecevabilité de ce moyen, qui ne figure pas parmi les motifs de l'acte de refus de renouvellement du bail, signifié le 9 juillet 2003, et qui, selon lui, ne pourrait plus être invoqué dans la suite de la procédure ; Qu'il prétend également que pour pouvoir lui refuser le renouvellement du bail pour ce motif, la SIP aurait dû lui faire délivrer d'abord la mise en demeure prévue par l'article L.145-17-I du Code de commerce ; Que le défaut d'habilitation pour enseigner la pratique de la culture physique, ou l'omission d'une déclaration légale à effectuer pour exploiter une salle de sport, ne relèvent pas de l'inexécution d'une obligation incombant au preneur, mais de conditions à remplir pour pouvoir bénéficier du statut des baux commerciaux ; Qu'il en résulte que d'une part, la bailleresse n'avait pas à mettre en demeure son locataire d'avoir à se conformer à une réglementation sans relation avec le bail et qui s'imposait à lui personnellement, et que d'autre part, elle pouvait, à tout moment de la procédure, soutenir que ce statut n'était pas applicable ; Qu'en second lieu, il résulte d'une attestation versée régulièrement aux débats par la SIP et délivrée le 6 octobre 2003, par un agent assermenté de la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports du Var que Monsieur X... Freddy n'avait, à cette date, déposé auprès de ses services aucune déclaration d'établissement d'activité physique et sportive conforme à la législation en vigueur déjà depuis 1984 ; Qu'il s'ensuit que celui-ci se trouve dans l'illégalité et ne peut donc bénéficier des dispositions susvisées de l'article L.145-2 du Code de commerce,

ALORS QUE d'une part il appartient au juge saisi d'un litige opposant les parties à un bail commercial quant à l'application au preneur du statut des baux commerciaux de rechercher si le preneur bénéficiant d'une autorisation d'exercer délivrée sous l'empire d'une législation ensuite abrogée est tenu de déposer une nouvelle déclaration; qu'en énonçant que l'établissement d'activité physique et sportive exploité par Monsieur X... n'avait fait l'objet d'aucune déclaration dans les conditions prévues par les articles 47 et 47-1 de la loi du 16 juillet 1984, de sorte qu'il ne pouvait bénéficier du statut des baux commerciaux, sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de l'appelant ( prod.10 pages 2 et 6) si Monsieur X..., qui exploitait ce même établissement depuis 1966 et avait d'ores et déjà déclaré cette exploitation le 22 janvier 1970 dans les conditions prévues par l'article 4 du décret n° 69-1000 du 3 novembre 1969 pris en application de la loi n° 63-807 du 6 août 1963, était tenu de procéder à une nouvelle déclaration dans les conditions prévues par le décret n° 93-1101 du 3 septembre 1993, pris en application de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 modifiée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 145-2 et L 145-17 du Code de commerce, L 463-4 du code de l'Education et 2 du décret n° 93-1101 du 3 septembre 1993 ;

ALORS QUE d'autre part et en tout état de cause, il résulte de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme que, si une personne peut être privée d'un droit de créance, c'est à la condition que soit respecté le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect de ses biens ; que ne répondent pas à ces exigences la loi du 16 juillet 1984 et le décret du 3 septembre 1993 en ce qu'ils imposent au titulaire d'une autorisation d'exercice professionnel qui a pris à bail un local commercial et bénéficie ainsi du statut des baux commerciaux de renouveler sa déclaration à la préfecture ; qu'en énonçant que Monsieur X... se trouvait privé du bénéfice du statut parce qu'il exerçait irrégulièrement son activité en l'absence de déclaration effectuée dans les conditions prévues par les articles 47 et 47-1 de la loi du 16 juillet 1984 et 2 du décret du 3 septembre 1993, la cour a violé ensemble les articles 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L 145-2 et L 145-17 du Code de commerce, L 463-4 du code de l'Education et 2 du décret n° 93-1101 du 3 septembre 1993 ;

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