Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 21 janvier 1997, 94-18.855 94-18.856 94-18.857 94-18.858 94-18.859, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Joint les pourvois n°s 94-18.855 à 94-18.859, qui attaquent la même ordonnance ;

Attendu que, par neuf ordonnances des 29 septembre 1992 et deux ordonnances complémentaires du 1er octobre 1992, le président du tribunal de grande instance de Lisieux a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux des sociétés Brochart Lemoine, Caudel, Le Revoir, le garage de M. Y..., les domiciles de M. Y... et de M. X... et Mme A... en vue de rechercher la preuve de la fraude mentionnée à l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 des sociétés Brochart-Lemoine, Caudel et Le Revoir et de Mme A... ;

Attendu que, les 7 et 28 juillet 1993, les sociétés à responsabilité limitée Caudel et Le Revoir, Mme A..., MM. Y... et X... ont demandé l'annulation des opérations de visite et saisie effectuées le 1er octobre 1992 ; que le président du tribunal de grande instance de Lisieux, par ordonnance contradictoire du 23 juin 1994, a rejeté leur demande ; que MM. X..., Y..., Z... A... et les sociétés Caudel et Le Revoir se sont pourvus en cassation de cette ordonnance du 23 juin 1994 ;

Sur le premier moyen des mémoires ampliatifs et le c) des mémoires personnels réunis :

Attendu que les sociétés Le Revoir, Caudel, Mme A..., MM. Delamare et Maurice X... font grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur requête en annulation des visites et saisies réalisées dans leurs locaux professionnels et domiciles, alors, selon les pourvois, que, dans le cadre d'une enquête diligentée, comme en l'espèce, en application de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les agents procédant aux visites et saisies doivent se borner à consigner les déclarations spontanées des intéressés sans pouvoir les interroger ; que l'ordonnance attaquée, qui ne constate pas que ce fût le cas des propos de M. X... dont il a été dressé procès-verbal, se trouve privée de base légale au regard de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu que les demandeurs au pourvoi n'allèguent pas que les agents de l'Administration aient consigné des propos recueillis sur interrogatoires et non des déclarations spontanées ; que le moyen est inopérant ;

Sur le deuxième moyen des mémoires ampliatifs et le b) des mémoires personnels, réunis :

Attendu que les sociétés Le Revoir, Caudel, Mme A..., MM. Delamare et Maurice X... font encore grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur requête en annulation des visites et saisies réalisées dans leurs locaux professionnels et domiciles, alors, selon les pourvois, que l'autorisation de procéder à des visites et saisies dans des " locaux " déterminés ne s'étend pas à la fouille de véhicules se trouvant, au demeurant, à l'extérieur desdits locaux, fût-ce dans la même enceinte ; que l'ordonnance attaquée méconnaît l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu que le président du Tribunal qui a autorisé une visite et saisie de documents dans un lieu n'est pas tenu de prendre une ordonnance spécifique autorisant la visite du véhicule appartenant à l'occupant de ces lieux et s'y trouvant ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen des mémoires ampliatifs et le 1 des mémoires personnels, réunis :

Attendu que les sociétés Le Revoir, Caudel, Mme A..., MM. Delamare et Maurice X... font, de plus, grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur requête en annulation des visites et saisies réalisées dans leur locaux professionnels et domiciles, alors, selon les pourvois, que les procès-verbaux ne font foi que jusqu'à preuve contraire, qui peut être rapportée par tous moyens ; qu'en écartant les témoignages offerts en preuve à raison de la qualité de leurs auteurs, sans en examiner le contenu, l'ordonnance attaquée, qui ne permet pas de déterminer s'il a été statué en droit ou en fait, se trouve privée de base légale au regard de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et de l'article L. 238 du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu que l'ordonnance retient que M. X... n'a fait aucune observation lors de la signature du procès-verbal ni lors de son audition ultérieure en présence de son conseil ; qu'à partir de ces constatations le président du Tribunal, qui a apprécié, quant à la valeur des preuves ainsi discutées devant lui, l'opportunité de procéder aux auditions demandées par M. X..., a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen des mémoires ampliatifs :

Attendu que les sociétés Le Revoir, Caudel, Mme A..., MM. Delamare et Maurice X... font, en outre, grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur requête en annulation des visites et saisies réalisées dans leurs locaux professionnels et domiciles, alors, selon les pourvois, que le juge saisi d'une requête tendant à l'annulation d'opérations de visites et saisies est tenu de contrôler, à l'invitation des requérants, la conformité des documents saisis à l'objet de l'autorisation qu'il a délivrée à l'Administration ; qu'en refusant de procéder à ce contrôle le juge a, en l'espèce, méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les autorisations de visite et saisie ont été sollicitées pour établir d'éventuelles ventes sans facture de la part de la société Brochard-Lemoine, le président du Tribunal a retenu qu' " il était légitime " de saisir les éléments comptables des personnes pouvant être en relation d'affaires avec cette société ; qu'ainsi, le juge, qui n'a pas constaté qu'avaient été saisies des pièces n'entrant pas dans le champ de l'autorisation accordée, n'a pas méconnu l'étendue de ses pouvoirs ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les moyens développés par les mémoires personnels non repris dans les mémoires ampliatifs :

Attendu que les sociétés Le Revoir, Caudel, Mme A..., MM. Delamare et Maurice X... font enfin grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur requête en annulation des visites et saisies réalisées dans leurs locaux professionnels et domiciles et invoquent les moyens figurant en annexe dans les a) et 2) des mémoires déposés tirés de la violation de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu, d'une part, que la possibilité de faire appel à un conseil ou d'avoir des contacts avec l'extérieur durant les opérations de visite et saisie domiciliaire n'est pas prévue par la loi, s'agissant d'une mesure d'instruction devant se dérouler, en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant, le plus rapidement possible, en présence d'un ou de plusieurs officiers de police judiciaire chargés de veiller au respect des droits de la défense et du secret professionnel, de prendre connaissance des documents avant leur saisie et d'informer le juge du déroulement des opérations ;

Attendu, d'autre part, qu'aucune disposition légale n'interdit à un agent habilité d'être désigné pour opérer en plusieurs lieux ou à un officier de police judiciaire de venir instrumenter dans un lieu pour lequel il aura été désigné avec d'autres officiers de police judiciaire ;

Que les moyens ne sont pas fondés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.

Retourner en haut de la page