Cour de Cassation, Chambre sociale, du 28 septembre 2005, 04-47.304, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 8 de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 et l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, "dans les établissements mentionnés à l'article L. 314-6 du Code de l'action sociale et des familles dont les accords collectifs de réduction du temps de travail ou les décisions unilatérales prises en application de Conventions collectives nationales ou d'Accords collectifs nationaux sont soumis à la procédure d'agrément ministériel, le complément différentiel de salaire prévu par un accord collectif en vue d'assurer aux salariés la garantie du maintien de leur rémunération mensuelle en vigueur à la date de la réduction collective du temps de travail à trente-cinq heures ou en deçà, n'est dû qu'à compter de la date d'entrée en vigueur des accords d'entreprise ou d'établissement ou des décisions unilatérales relatifs à la réduction collective du temps de travail. Cette entrée en vigueur est subordonnée à l'agrément ministériel prévu au même article. Ces dispositions s'appliquent sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée. Elles ne s'appliquent pas aux instances en cours à la date du 18 septembre 2002" ; qu'il résulte du second que si le législateur peut adopter, en matière civile, des dispositions rétroactives, le principe de prééminence du droit et la notion de procès équitable s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la Justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges ;

Attendu que Mmes X..., Y... et Z..., salariées de l'Association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales de la Haute-Garonne (ADAPEI) en qualité de chef de service éducatif, ont saisi respectivement, les 4,5 et 7 novembre 2002 la juridiction prud'homale de demandes en paiement de sommes à titre d'indemnités de réduction du temps de travail pour la période du 1er janvier au 31 août 2000 en application de l'accord cadre relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail, signé le 12 mars 1999 pour les entreprises relevant de la convention collective du 15 mars 1966 ;

Attendu que pour faire droit aux demandes des salariées, la cour d'appel, a, retenu que si aucune des salariées n'a saisi le conseil de prud'hommes avant le 18 septembre 2002, la loi de validation du 17 janvier 2003 vient combattre la jurisprudence de la Cour de cassation sur le complément différentiel de salaire alors que la simple invocation de l'impérieuse nécessité de sauvegarder la pérennité du service public de la santé ou de la protection sociale ne saurait suffire à caractériser les motifs impérieux d'intérêt général qui seuls peuvent justifier l'immixtion du pouvoir législatif dans l'administration de la Justice ;

Qu'en statuant ainsi alors, d'une part, qu'il résultait de la procédure que les instances n'étaient pas en cours à la date du 18 septembre 2002 et que les affaires n'étaient pas jugées lorsque la loi du 17 janvier 2003 est entrée en vigueur, et, d'autre part, qu'obéit à d'impérieux motifs d'intérêt général l'intervention du législateur destinée à aménager les effets d'une jurisprudence nouvelle de nature à compromettre la pérennité du service public de la Santé et de la Protection sociale auquel participent les établissements pour personnes inadaptées et handicapées, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la Cour est en mesure, conformément à l'article 627 du nouveau Code de procédure civile, de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

REJETTE les demandes des salariées ;

DIT que les dépens afférents devant les juges du fond et la Cour de cassation seront supportés par les salariées ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille cinq.

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