COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 6ème chambre - formation à 3, 09/10/2014, 14LY00191, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2014, présentée pour Mme A... B...domiciliée ...;

Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302215 du 17 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 25 juillet 2013 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prévu, en cas de maintien sur le territoire français, sa reconduction d'office à destination du Kosovo ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de cette notification et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat ;

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que le tribunal administratif n'a pas examiné la branche du moyen tiré de ce qu'il n'est pas établi que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a été transmis au préfet sous couvert du directeur de l'agence ;
- le refus de titre est entaché d'un vice de procédure dès lors que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'a pas été transmis sous couvert du directeur de l'agence, la privant ainsi d'une garantie ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé en ce qu'il ne mentionne pas les éléments de fait concernant le refus de délivrer un titre sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- le Tribunal a statué au-delà des prétentions des parties en estimant que l'absence de traitement n'aurait pas de conséquence d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé alors que ni le médecin de l'agence régionale de santé, ni elle-même, ni le préfet ne l'ont soutenu et que le préfet, dans la décision litigieuse, a mentionné le contraire ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de soins appropriés à son état de santé ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour et méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire, méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 7 mai 2014 fixant la clôture d'instruction au 28 mai 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mai 2014, présenté par le préfet de la Côte-d'Or qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- il n'avait pas à saisir pour avis le directeur de l'agence régionale de santé et l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'est pas entaché d'irrégularité ;
- l'arrêté est suffisamment motivé ;
- il n'avait pas à consulter la commission du titre de séjour ;
- il n'a méconnu ni les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine et compte tenu de ce que les pathologies de la requérante ne sont pas d'une exceptionnelle gravité, ni celles du 7° dudit article L. 313-11, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire n'est pas illégale en raison d'une illégalité du refus de titre de séjour qui n'est pas établie, et ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination n'est pas illégale en raison d'une illégalité de l'obligation de quitter le territoire qui n'est pas établie, ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance du 5 juin 2014 portant réouverture de l'instruction en application des dispositions de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu la décision du 18 septembre 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2014 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme B..., ressortissante kosovare née le 5 mai 1971, a déclaré être entrée irrégulièrement en France le 4 mai 2011 ; qu'elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 23 juin 2011, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 mars 2012 ; qu'elle a sollicité le 21 mai 2012 la délivrance d'un titre de séjour au regard de son état de santé ; que le préfet de la Côte-d'Or lui a délivré le 19 juin 2012 un titre de séjour mention " vie privée et familiale " en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle a sollicité le renouvellement de ce titre le 21 mai 2013 ; que, par décisions du 25 juillet 2013, le préfet a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prévu, en cas de maintien sur le territoire français, sa reconduction d'office à destination du Kosovo ; que, Mme B... relève appel du jugement du 17 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ;
3. Considérant que l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé prévoit que, au vu d'un rapport médical et des informations dont il dispose, " le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission de séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé (...) " ;
4. Considérant que la procédure administrative définie par les dispositions précitées a pour objet de permettre au préfet d'être suffisamment éclairé quant à la décision à prendre au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la circonstance que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'a pas été adressé au préfet, en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé alors que ce dernier est amené à transmettre au préfet un avis complémentaire motivé s'il estime, au vu des informations dont il dispose, que des circonstances humanitaires exceptionnelles peuvent justifier l'admission de séjour, constitue une irrégularité affectant le déroulement de cette procédure ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'a pas été transmis sous couvert du directeur de l'agence est opérant ; que, comme elle le soutient, Mme B... avait soulevé, dans sa demande devant le tribunal administratif, le moyen tiré de ce que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'avait pas été adressé au préfet sous couvert du directeur de l'agence ; que le Tribunal qui a omis de statuer sur ce moyen, a entaché son jugement d'irrégularité ; que, dès lors, la requérante est fondée à en demander l'annulation ;
5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme B... devant le tribunal administratif ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;
7. Considérant que la décision contestée, qui énonce les considérations de droit et les raisons de fait justifiant le rejet de la demande de titre de séjour de Mme B... qui a été présentée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 précité ; que notamment, et contrairement à ce qu'allègue la requérante, le préfet n'avait pas à mentionner les raisons pour lesquelles il estimait que l'intéressée ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que Mme B... n'a pas demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de cet article et qu'il résulte des termes mêmes de la décision que le préfet n'a pas refusé la délivrance d'un titre sur ce fondement ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;
9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 18 juin 2013 aurait été transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé, comme le prévoit l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 ; que, toutefois, dans cet avis du 18 juin 2013, le médecin de l'agence régionale de santé estime, au vu du certificat médical fourni, que l'état de santé de la requérante nécessite des soins, qu'un défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé au vu de l'absence d'un traitement approprié dans son pays d'origine, et que la durée prévisible de traitement est d'un an à compter de la date de cet avis ; que par ailleurs, l'avis ainsi communiqué au préfet par le médecin de l'agence régionale de santé n'a pas mentionné des informations relatives à des considérations humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions précitées pouvant fonder une décision d'admission de séjour si cet avis venait à ne pas être suivi ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'il existait de telles circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions précitées ; que, par suite, cette irrégularité n'a pas exercé, en l'espèce, d'influence sur le sens de la décision prise et n'a pas davantage privé l'intéressée d'une garantie ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 que le médecin de l'agence régionale de santé n'est pas tenu de mentionner dans son avis si l'état de santé de l'étranger, qui nécessite des soins dont le défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, lui permet de voyager sans risque pour se rendre dans son pays d'origine ;
11. Considérant, en quatrième lieu, que si le préfet n'est pas lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, il lui appartient néanmoins, lorsque, comme en l'espèce, ce médecin a estimé que l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans le pays dont il est originaire, de justifier des éléments qui l'ont conduit à écarter cet avis médical ;
12. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux produits par Mme B... devant les premiers juges puis en appel, qu'elle souffre de troubles psychiatriques ; que le certificat médical du 29 février 2012 établi par un psychiatre suivant l'intéressée en France depuis le 22 septembre 2011 mentionne que son état de santé qui résulte de traumatismes psychiques nécessite un suivi en consultations psychiatriques régulières et la prise de psychotropes au long cours, ce même psychiatre mentionnant en outre le 26 août 2013 que ce traitement prodigué le 29 février 2012 avait été poursuivi régulièrement, avait permis une certaine stabilisation de son état de santé et devait être poursuivi ; que, dans son avis du 18 juin 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé, comme il a été dit ci-dessus, que l'état de santé de la requérante nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'un traitement approprié n'existe pas dans le pays d'origine ;
13. Considérant que le préfet de la Côte-d'Or a toutefois produit devant les premiers juges plusieurs rapports établis par les services de l'ambassade de France au Kosovo à la suite des contacts pris avec les autorités sanitaires locales, aux termes desquels le Kosovo dispose de structures sanitaires psychiatriques aptes à prendre en charge l'affection dont souffre la requérante et de la totalité des médicaments nécessaires et indispensables au traitement psychiatrique, notamment les antidépresseurs et les anxiolytiques, lesquels sont disponibles dans toutes les pharmacies ; que si le rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), dont se prévaut la requérante, indique que les moyens mis en oeuvre au Kosovo pour soigner les troubles psychiatriques sont insuffisants par rapport aux besoins de la population, ni ce document, ni les autres pièces notamment médicales produites par l'intéressée ne réfutent les éléments produits par le préfet devant les premiers juges établissant l'existence de soins adaptés et d'un réseau de prise en charge au Kosovo pour les affections dont souffre l'intéressée, quand bien même le degré de prise en charge ne serait pas optimal par rapport à celui pratiqué en France et l'accessibilité aux soins serait rendue difficile en raison de son coût ;
14. Considérant que, dès lors, le préfet, qui comme il a été dit précédemment n'est pas lié par l'avis et l'appréciation portés par le médecin de l'agence régionale de la santé, n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas commis d'erreur d'appréciation, ni d'erreur de droit, en estimant que la requérante ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade du fait de l'existence de traitement approprié au Kosovo ;
15. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
16. Considérant que Mme B... fait valoir qu'elle séjourne régulièrement sur le territoire français depuis plus de deux ans, qu'elle vit chez sa soeur et son beau-frère titulaires d'une carte de résident, qu'elle a tissé avec ces derniers des liens privilégiés, qu'elle assiste régulièrement à des cours de français auprès de différentes institutions, qu'elle a travaillé avant les décisions contestées et qu'elle bénéfice d'une promesse d'embauche ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., célibataire et sans enfant, a vécu au Kosovo jusqu'à l'âge de 40 ans avant son arrivée récente en France, le 4 mai 2011 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales au Kosovo, ni qu'elle ne pourrait reconstituer, en dehors de la France, sa vie privée et familiale, notamment au Kosovo en raison d'un conflit familial et d'un comportement violent de son ancien concubin ; que, dans ces conditions, et eu égard aux conditions de son séjour en France et à la durée de sa présence sur le territoire français, et nonobstant ses efforts d'insertion, le préfet n'a pas, en prenant les décisions litigieuses, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée de mener une vie privée et familiale normale au regard des buts poursuivis ; qu'il n'a ainsi méconnu ni, en tout état de cause, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage commis, dans les circonstances de l'espèce sus-décrites, une erreur manifeste d'appréciation ;
17. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement toutes les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que Mme B... n'établit pas être au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour ; que, par suite, le préfet de la Côte-d'Or n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que le moyen tiré du vice de procédure doit, dès lors, être écarté ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
18. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;
19. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être exposé, le préfet de la Côte-d'Or a refusé le 25 juillet 2013 la délivrance d'un titre de séjour à Mme B... ; qu'ainsi, à cette date, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

20. Considérant, en deuxième lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B...n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus, doit être écarté ;
21. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;
22. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il ressort des pièces du dossier qu'il existe pour Mme B...un traitement approprié dans son pays ; que, dès lors, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
23. Considérant, en dernier lieu, que, compte tenu des éléments précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant un délai de départ volontaire de 30 jours :

24. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;
25. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
26. Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par la voie d'exception, de l'illégalité de cette décision doit être écarté ;
27. Considérant, en deuxième lieu, que compte tenu des éléments précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
28. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;
29. Considérant que Mme B...soutient qu'elle ne peut retourner au Kosovo, pays qu'elle a dû fuir compte tenu d'un conflit familial, sa famille voulant la marier de force et l'ayant rejetée à la suite de son refus, et des violences verbales et physiques de la part de son concubin ; que toutefois, la requérante, dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ne produit pas d'élément établissant la réalité et la gravité des risques auxquels elle serait personnellement exposée en cas de retour dans son pays ; que par suite la décision fixant le pays dont elle a la nationalité comme pays d'éloignement n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
30. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions contestées ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon n° 1302215 du 17 décembre 2013 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme B...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2014, à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 octobre 2014

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N° 14LY00191




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