Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 10/02/2015, 14BX01304, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2014, présentée pour M. C...A...demeurant à ...par Me B...;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401416 du 28 mars 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une part, de l'arrêté du 25 mars 2014 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a obligé à quitter le territoire sans délai et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, de l'arrêté du même jour décidant son placement en rétention administrative ;

2°) d'annuler les arrêtés contestés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir en cas d'annulation de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;
------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue, premier conseiller ;
- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;


1. Considérant que M.A..., de nationalité guinéenne, est entré en France le 4 mai 2013, selon ses déclarations ; que, se déclarant mineur, né le 10 mars 1997, le juge des enfants l'a confié, par jugement du 14 juin 2013, auprès des services du conseil général de la Haute-Garonne pour une durée de neuf mois et une mesure de placement au sein de la MECS à Revel a été prononcée ; que, par arrêté du 24 mars 2014, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre une mesure portant obligation de quitter le territoire sans délai en fixant le pays de renvoi et a ordonné par arrêté du même jour, son placement en rétention administrative ; que M. A... relève appel du jugement du 28 mars 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;


Sur l'obligation de quitter le territoire :

2. Considérant que l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, notamment la présence irrégulière en France de M. A... et les éléments de sa situation personnelle et familiale ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans " ;

4. Considérant que lors de son interpellation par les services de police de l'air et des frontières le 24 mars 2014, M. A...a déclaré être mineur ; qu'il a fourni la copie d'un passeport délivré par les autorités consulaires de son pays d'origine après son arrivée en France établi à son nom et avec pour date de naissance le 10 mars 1997 ; que toutefois, les investigations de la police et notamment l'interrogation du fichier informatique Visabio ont fait apparaître qu'il avait sollicité un visa auprès des autorités tunisiennes pour lequel il a présenté un passeport ordinaire guinéen en cours de validité indiquant qu'il est né le 2 janvier 1992 ; qu'un test osseux réalisé au service de médecine légale de Rangueil a révélé que la probabilité que M. A...soit âgé de 19 ans est de 77% et de 23% qu'il soit âgé de 18 ans ; qu'il ressort également des pièces du dossier que les officiers de police judiciaire qui se sont vus remettre le passeport établi par les autorités consulaires de son pays d'origine faisant état de sa minorité n'ont pu établir que la photographie de ce document correspondait à M.A... ; que si la méthode des tests osseux ne permet d'obtenir qu'une estimation scientifique de l'âge et ne peut à elle seule remettre en cause la validité d'un passeport délivré par une autorité étrangère, le préfet n'a pas fondé son appréciation sur ce seul élément ; que dans ces conditions, en estimant que M. A...était majeur et entrait ainsi dans les cas où une mesure d'éloignement peut être prise à l'encontre d'un étranger le préfet de la Haute-Garonne n'a entaché sa décision ni d'erreur de fait ou ni d'erreur de droit ;


Sur le pays de renvoi :

5. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas illégale, M. A...n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, son illégalité à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ;

6. Considérant que la décision fixant le pays de renvoi vise les textes applicables et précise que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitement contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est par suite, suffisamment motivée ;


Sur le délai de départ volontaire :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant que la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire vise les textes dont il est fait application ainsi que les éléments de fait qui justifient une telle mesure et notamment l'absence de document d'identité en cours de validité, l'entrée irrégulière sur le territoire, l'absence de démarche de M. A...tendant à la régularisation de sa situation administrative et le fait qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente à l'administration ; que cette décision qui comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement est suffisamment motivée ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français:/ 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants: a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour; / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. " ;

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, le passeport présenté par M. A...ne saurait être regardé comme un document d'identité en cours de validité ; qu'il n'avait en sa possession aucun autre document d'identité ; que si M. A...se prévaut de sa minorité, il ne l'établit pas ; qu'il est entré irrégulièrement en France et n'y a jamais sollicité son admission au séjour ; que, par suite, sa situation entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° a) et f) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent à l'autorité administrative de priver l'étranger d'un délai de départ volontaire sauf circonstances particulières ; que si M. A... se prévaut de garanties de représentation, celles-ci ne sont pas établies ; que, dans ces conditions, le préfet a pu, sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation, estimer que M. A...n'était pas dans une situation particulière permettant d'écarter le risque de fuite ;


Sur le placement en rétention :

11. Considérant que l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

12. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : /6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ;" ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ;

13. Considérant que M. A...n'établit pas disposer de ressources stables ; qu'il s'est maintenu sur le territoire français en tentant de dissimuler son identité en se déclarant mineur ; qu'il a par ailleurs déclaré vouloir rester en France ; qu'il ne peut ainsi soutenir qu'il présenterait des garanties de représentation qui auraient rendu inutile son placement en rétention ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de la mesure de rétention doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et celles fondées sur les dispositions combinées des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
''
''
''
''
2
No 14BX01304



Retourner en haut de la page